De toutes les stratégies de pêche en réservoir, il en a une que j’affectionne plus particulièrement et dont je vous parle souvent.
Au fil, un simple brin de nylon coloré comme source d’espoir.
Au fil, rien qu’au fil ou l’on dessine à chaque lancer la courbe d’une immersion la plus lente possible.
Destin d’une nymphe qui se doit de plonger tout en douceur en restant dans le cercle
Une stratégie souvent délaissée au profil de méthode à la maitrise plus rapide.
Nul question d’animation. Nul question de miser sur la vue.
La pêche au fil nécessite un temps long pour comprendre la vie de chaque plan d’eau, les zones de passage des poissons, leur zone de repos et d’alimentation.
Nous parlons de sensation, d’impression qui trahissent le moindre indice .Nous nous éloignons petit à petit des approches pantagruéliques ou l’on construit sa journée autour de plusieurs cannes. Nous résumons notre traque à son expression la plus simple.
Notre matériel rivière devient un parfait allié pour accomplir la tâche du jour.
S’il me fallait résumer ces heures passées à croiser le fer, canne en main avec les habitantes de gerris, point de doute pour prétendre à la pertinence de l’expression « tout ou rien ».
La pêche au fil se résume à cela .De longues minutes ou guère de chose viennent bouleverser le paysage. Puis sans tout à coup la soie se tend, le combat se fait plus lourd et l’on a la chance de se mesurer à une belle mémère.
Quel pied d’affronter un tel adversaire à une soie de 5.Tout est là, dans cette réalité.Ce choix d’aller à la rencontre d’un partenaire puissant avec un outil le plus léger possible
N’est-ce pas le sens de ma venue dans ces lieux ; l’adrénaline de ces rencontres, l’incertitude de l’issue.
Trop facile de se vanter à mon gout de la réussite d’un coup de ligne si celui-ci n’a laissé guère d’opportunité à notre soldat de se défaire de notre emprise.
Il n’est pas question de vous faire l’apologie d’une pratique ou l’on voudrait fatiguer à outrance sa partenaire au point de mettre sa survie en parenthèse.
Bien au contraire, j’ai pour ma part trop de respect pour ses poissons de nos réservoirs dont il nous faut mesurer que leur existence réside dans notre besoin égoïste de nous divertir.
Dois-je confesser ici mon inquiétude à imaginer que les truites, les ombres, tout ce qui nage m’amuse bien plus que certains bipedes.Est ce peut être la raison profonde de ma passion pour la pêche. Fuir comme la peste l’ennui.
Comme un rituel, j’aime ces courts instants ou le contact s’établit .Je prend le temps d’admirer l’animal au fond de l’épuisette.
Quelques secondes encore.
Il ne me dérange guère d’entrer dans l’eau glaciale pour immortaliser une scène.
Une photo comme le témoignage de ce moment. Une photo, prétexte surtout à prolonger l’instant.Une photo qui se doit d’être la plus attentionnée possible.
Quelle étrange idée de présenter un poisson suspendu par la bouche à l’image de ces photos d’une caste leuriste .
S’il me fallait donner un avis sur la question , j’oserai prétendre avec un peu d’expérience au fil des années que le fait de sortir un poisson de l’eau quelques secondes ne le conduit pas forcement à la mort , faut-il simplement le faire avec douceur , en prenant soin de soutenir celui-ci.
Une main sur la caudale , un simple appui sous le ventre , tout cela fait au dessus de l’eau. Une option qui me semble être la moins préjudiciable si l’on veut se fabriquer un souvenir.
Mais une fois de plus je me fais ici défenseur de ce désir de graver l’image.De cette volonté de prendre ces instants nécessaires à la photo.
Non que je les juge indispensable mais qu’ils sont à mon sens le témoignage d’un état d’esprit ou un poisson cesse d’être un outil de performance pour devenir un support d’admiration.
Voilà ce que j’aime dans la pêche au fil en réservoir , son inefficacité parfois , ses contraintes , ses déceptions , son impertinence à être la meilleur façon de pratiquer.
Pourtant elle est pour moi l’éloge d’une approche ou chacune de nos sorties se transforment à une communion avec nos lacs et leurs habitants.
Des rencontres dont on se nourrit ,qui alimentent nos rêveries halieutiques.Des rencontres parfois si rares à l’image de cette superbe koi prise par Armand.
Baptême reussi d’un HOH Clan 9 soie 6 qui a tenue toutes ses promesses…