Il y a des truites que l’on se rappelle , comme des souvenirs indelebiles.
Hier j’ai eu la chance , l’honneur de croiser une beauté auvergnate.
J’avais hésité sur la destination , le choix est immense .En ce moment j’ai envie de petit , de pêche technique , de frondaison qui tombe sur la rivière , de me compliquer la vie en somme.Le haut alagon s’offre donc comme une evidence.
Le secteur de Neussargue-Murat sera mon port d’attache pour la journée.
Je me prépare tranquillement , la vallée est sombre .Le temps est à l’orage.Dans la prairie les premières mouches volent au dessus des salers.Le secrète espoir d’une partie de pêche en sêche est là .
Mais après plus d’une heure de pêche , pas grand chose à me mettre sous la dent.Je suis donc passé en nymphe mais là encore la déception est palpable.
C’est en arrivant sur un petit radier qui fait suite à gros gour profond que j’aperçois dans la bordure un gobage , une belle bulle qui trahis la présence de la belle .
Malheureusement l’orage éclate , l’odeur , la vallée gronde , les éclairs m’inquiète.J’hésite à revenir à la voiture.Rester ici , blottit contre un arbre sympathique n’est pas peut être pas la meilleur stratégie pour éviter les risques.
Au bout d’un moment l’orage cède , je scrute la zone .Les ecdyos virevoltent de ci , de là .La belle est toujours là , je viens de la revoir.
A la vue du gobage , j’ose croire à un joli poisson .En ces lieux si petit , une belle de 35-40 est déjà une magnifique dont on sait la valeur.
Je coupe mes nymphes .Au fil je ne prend plus la peine d’élever mes brins fluos.Sur la pointe je fixe mon imitation.Premier passage , premier ferrage .Mais un clac raisonne , j’avais oublié que j’ai affiné la pointe , mon 10/100 sonne mon erreur.Je rage sur mon manque de sérieux.Attaquer un beau poisson en sêche ne doit rien laisser au hasard , une fois encore j’ai fait dans l’imprécision , dans la précipitation , je suis puni.
Pourtant alors qu’il me reste à peine une 40aine de cm de 12/100 juste derrière mon 25 orange , je décide de remettre un mouche et de repasser sur la zone.La belle remonte , elle mange et rien ne pourra l’arrêter.Ce sont ces moments là de frénésie alimentaire ou les truites perdent toutes notions.
Le combat s’engage.
La belle file entre les rochers , le courant s’accélère , elle le sait moi aussi.Je rentre dans l’eau pour éviter qu’elle dévale …..je me casse la gueule , le gilet est trempé , je me suis en plus fracassé le dos mais je la tiens coûte que coûte ….
La frondaison me gène et la 10 pied me semble immense , …je galère comme un âne ; cela commence à s’éterniser entre rush et sondage du fond , l’eau s’est fortement cassé avec l’orage .Au bout d’un bon moment la filoute se cale sous un rocher ….je pose le gilet pour rentrer dans l’eau , tape à grand coup de pied dans le rocher ….elle se décale enfin.En ces lieux le 12/100 risque gros , le moindre rocher peut tout faire foirer.
Petit à petit je sens la belle qui s’épuise , un dernier rush , elle est remonté dans le gour qui est bien profond , je suis dans le trou , de l’eau ras le waders .Elle monte en surface , je tente ma chance
La voilà à l’épuisette …..je la regarde , la contemple ….elle est magnifique , superbement ronde , une robe avec la joue bleuté des filles de l’alagnon .Mon axe de l’epuisette avoisinant les 48cm…..posé , elle est tres proche des extremités malgré son affaissement sur le flan ….en la soulevant elle touche le 2 cotés , je l’estime donc dans le voisinage des 50cm , peut être un poil en dessous.
Je la decroche , sort l’apareil, mais je suis un peu ailleurs , je lui tire le portrait trés vite ….j’ai du mal à faire comme d’habitude avec application , l’emotion peut etre ; la conscience qu’ un telle poisson si haut sur la riviere , c’est à mon sens rare.
Posé là , au fond du filet , elle n’impression guere , mais il suffit de regarder une image d’un autre poisson d’environ 25cm pris juste avant pour comprendre les années qu’il a fallu , la ruse que la belle a employé pour eviter de finir dans un panier.
Là seul , au milieu de nul part , j’admire la nature , sa beauté.La belle repart , s’enfonce dans la profondeur du gours.Il me reste un souvenir d’une rencontre , d’un instant magique.Je sais combien ces poissons ,e snnt pas legion en ces lieux.
Nous ne sommes pas ici sur une de ces rivieres calcaires qui produisent des poissons de 50 en trois coups de cuilleres à pots.Nous sommes sur la haut cantal.
Je me rappelerai de toi , beauté auvergnate…..